Les hommes de Mokorno
Lakhdhar BouragaaCar pour moi, comme pour plusieurs générations, la guerre de libération ne fut pas seulement le début d’une nouvelle vie, d’une nouvelle époque, mais un acte de naissance, un acte fondateur de ce que nous sommes, de ce que nous devions être, ce que nous n’aurions jamais du cessé d’être : des hommes libres, des Algériens vivant librement dans un pays libre.
Je considère que j’au eu une chance immense, comme toute une génération, celle qui est arrivée à la force de l’âge au moment où le pays se battait pour son existence et avait besoin de toutes ses potentialités. J’ai participé, comme des millions d’autres, à une épopée, celle de la libération. [...]. J’ai eu à subir des accrochages en compagnie d’un homme qui était plus qu’un mythe, Si M’Hamed Bougara, j’ai fait face aux épreuves en compagnie d’un géant, Si Mohamed Bounaama, j’ai côtoyé Si Salah Zaamoun dans les moments fastes et dans le drame.
J’ai connu plus tard l’injustice, j’ai subi la soif du pouvoir. J’ai vécu les affres de la prison, j’ai assisté à la mort de nombreux espoirs, à la destruction de nos rêves. [...]. J’ai assisté, impuissant, à un spectacle qui m’a révolté, et j’ai tenté de m’y opposer [...] Mais ceci n’efface pas l’oeuvre accomplie par ces hommes que j’ai côtoyés pendant six ans au sein de l’Armée de Libération Nationale. [..] Pour eux, rejoindre l’ALN n’était pas un acte de courage, mais une évidence : on ne peut vive que libre. La mort, la chahada, n’était pas une menace, mais la récompense suprême.
Devant tous ces hommes, je m’incline. A la mémoire de ceux qui sont partis, et en hommage à ceux qui ont été leurs compagnons, je dédie ce livre.
Lakhdar Bouraga